Lorsque quelqu’un.e vous porte un coup, vous ne restez pas là les bras ballants à rien faire. Vous réagissez. Eh bien quand quelqu’un.e vous lance un argument, vous devriez faire de même. Mais comment contre-argumenter ?
Dans les sports de combat (et on a vu avec Schopenhauer que l’argumentation en est un), il y a quatre grandes possibilités :
Esquiver, c’est bouger ton corps pour qu’il ne soit plus sur la trajectoire du coup qui t’est porté.
Dans un débat, c’est dire « oui mais ». Tu ne trouves rien à redire à l’argument de l’autre, tu le laisses dire, et l’argument prend sa place. Simplement, toi, tu n’es pas impacté parce que tu te dérobes, tu pars ailleurs, sur autre chose.
Il y a des esquives meilleures que d’autres, selon ta rapidité de réaction. Parfois, tu ne vois pas le coup venir et tu ne bouges pas assez vite. Au lieu d’être KO, tu es un peu éraflé. Mais le coup est porté, et tu es un peu touché quand même.
Mais même si tu esquives tout à fait, que le poing de l’adversaire, la pointe de son épée, le bol de son pied, arrive dans le vide… Tu n’as ni bloqué son coup, ni su contre-attaquer. Il faut vite faire autre chose, si tu veux rester dans le jeu. Sinon, tu n’affaiblis pas l’adversaire… à moins que ta stratégie soit de le laisser s’épuiser en esquivant tous les arguments ?
Dans une parade, on utilise l’énergie du coup de l’adversaire pour la détourner et le repousser. Mais on ne le place pas vraiment en mauvaise posture pour autant…
On ne s’empare pas vraiment de l’argument qui est porté. On le dévie, on le pousse sur le côté pour ne pas être touché. Plus efficace qu’une esquive, plus sûr.
Saisir, c’est attraper l’adversaire et ne pas le laisser se dégager si facilement : une fois que vous le tenez, que vous avez saisi tel ou tel élément de son argument (un présupposé bancal, un mot maladroit, une généralisation hâtive, bref une faiblesse par laquelle vous le tenez), vous êtes en très bonne posture pour contre-attaquer. Qu’est-ce qui vous retient de prolonger votre mouvement et de lancer dans le même geste une bonne contre-attaque radicale ?
Utiliser l’énergie de l’argument de l’adversaire pour contre-attaquer avec, voilà ce qu’on peut faire de mieux.
L’efficacité d’une contre-attaque est en effet souvent plutôt dans sa subtilité, sa souplesse, que dans sa violence.