MigrationS

Y a-t-il toujours eu des migrations ?

Les humains ont toujours voyagé. En ce sens, on peut dire que nous sommes des migrateurs. La période pendant laquelle l’humanité entière était nomade a duré 277 fois celle, récente, où nous sommes sédentaires, qui a débuté il y a seulement onze mille ans.

Ainsi, l’humanité a longtemps vécu dans des habitats légers en se déplaçant pour trouver de la nourriture et des conditions météorologiques confortables. La sédentarisation des humains, qui les a ancrés dans le territoire où ils ont construit leur habitat « en dur », a marqué une pause dans la grande mobilité des populations pré-néolithiques.

Depuis que les humains sont sédentaires, les mouvements de population sont moins systématiques. Et bien qu’il y ait toujours eu des déplacements, parfois sur de longues distances, parfois de grands groupes, lorsqu’on travaille sur les vagues migratoires, on place le début des migrations de masse aux alentours de 1880.

C’est ce que fait Catherine Wihtol de Wenden, directrice de recherche au CNRS (CERI) et docteur d’État en science politique (Institut d’études politiques de Paris), spécialiste des migrations internationales dans l’extrait ci-contre((Catherine Wihtol de Wenden, La mondialisation des migrations, TEDxBelfort. URL : https://www.youtube.com/watch?v=dT8B8Epdwqk)) : 

Rapide histoire des migrations en Belgique

1. Émigration

Durant le premier centenaire d’existence du pays (entre 1830 et la fin de la Première Guerre mondiale), la Belgique est avant tout un pays d’émigration. C’est-à-dire qu’il y a bien plus de Belges qui quittent le territoire (essentiellement pour trouver un emploi dans les industries du nord de la France, mais dès 1890 les belges s’embarquent pour les USA) que d’étrangers arrivant en Belgique. Les Belges émigrent aussi à l’intérieur des frontières nationales : à partir de 1850, des Flamands émigrèrent vers les centres industriels wallons pour échapper à la pauvreté.

En outre, l’émigration belge a connu deux moments importants lors des deux guerres mondiales avec la fuite en masse de Belges en recherche de protection dans les pays voisins. À titre d’exemple, plus d’un million de Belges ont quitté le pays durant la Première Guerre mondiale (1914-18). 

2. Immigration

Entre 1921 et 1939, la Belgique avait déjà connu des arrivées importantes de travailleurs en provenance des États voisins, d’Europe de l’Est et d’Italie. Mais la hausse du chômage dans les années 30 met un frein aux politiques d’appel de travailleurs immigrés en 1933. Après la Seconde Guerre mondiale, la Belgique connaît plusieurs décennies d’immigration étrangère composée essentiellement de travailleur·euses venant du bassin méditerranéen. Nombreux·ses parmi ceux-ci sont venus pour travailler dans les industries lourdes (mine, sidérurgie…) dans le cadre d’accords bilatéraux avec des pays comme l’Italie (dès 1946), le Maroc et la Turquie.

3. Immigration zéro

Après avoir activement recruté des travailleurs étrangers par ce biais, les autorités belges ont mis en place, suite aux « chocs pétroliers » des années 1970, une politique dite de « l’immigration zéro ». Contrairement à ce que son nom pourrait laisser penser, cette politique ne signifie par la fin des flux d’étrangers vers la Belgique mais plutôt la fin d’une politique active de recrutement de travailleurs étrangers.

4. Continuité de l’immigration

Depuis 1974, la population immigrée installée en Belgique continue de croître par le biais du regroupement familial (c’est-à-dire le droit pour un étranger de rejoindre un proche installé légalement en Belgique), l’arrivée de nouveaux réfugiés fuyant les conflits (par exemple, au Rwanda, dans les Balkans, en Irak ou en Syrie), la migration étudiante et, surtout, l’arrivée d’étrangers provenant de l’Union européenne.

((Sources de cette section : Jean-Michel Lafleur et Abdeslam Marfouk, Pourquoi l’immigration?, 21 questions que se posent les Belges sur les migrations internationales au XXIe siècle, Academia-L’Harmattan, 2017, pp. 25-26. URL : https://orbi.uliege.be/bitstream/2268/215503/1/Livre_Lafleur&Marfouk.pdf ; Marco Martiniello et Andrea Rea, Une brève histoire de l’immifration en Belgique, Bruxelles, Fédération Wallonie-Bruxelles, 2012, p.9))​

Migrations internationales totales (Belges et étrangers) 1948-2019

Le solde migratoire est calculé en faisant la différence entre le nombre d’immigrations internationales totales et le nombre d’émigrations internationales totales((Image issue des données de Statbel, l’office belge de statistique. URL : https://statbel.fgov.be/fr/themes/population/migrations#figures)).

À partir des quelques phrases ci-dessus, replace sur la ligne du temps ci-contre les événements historiques qui ont jalonné l’histoire de l’immigration dans notre pays : 

Pourquoi les gens migrent-ils aujourd'hui ?

Laissons à nouveau la parole à Catherine Wihtol de Wenden concernant les raisons qui, aujourd’hui, font que certaines personnes quittent leur pays –et qui poussent à parler de « seconde vague d’immigration de masse ».1 :

Quelques chiffres

Puisque, comme le dit Hannah Arendt, les chiffres sont « l’unique argument qui frappe les gens modernes »((Hannah Arendt, Nous autres, réfugiés, trad. Danielle Orhan, Paris, Allia, 2019, p. 18)), penchons-nous quelques instants sur les statistiques dont on nous mitraille dès qu’il s’agit de migrations, et essayons d’y voir un peu plus clair. D’abord, quelle différence entre immigrés et étrangers, et combien sont-il·le·s en Belgique ? ((Source de l’image ci-contre : Jean-Michel Lafleur et Abdeslam Marfouk, Pourquoi l’immigration?, 21 questions que se posent les Belges sur les migrations internationales
au XXIe siècle, Academia-L’Harmattan, 2017, p. 33. URL : https://orbi.uliege.be/bitstream/2268/215503/1/Livre_Lafleur&Marfouk.pdf))

Immigré:étranger
Quelques termes clés2

Il s’agit de toutes les personnes nées à l’étranger et résidant officiellement en Belgique. Elles ont quitté un autre pays pour venir s’établir en Belgique. Le critère est le pays de naissance. Les personnes immigrées incluent de ce fait des personnes de nationalité étrangère et des personnes devenues Belges.

Elle rassemble toutes les personnes qui n’ont pas la nationalité belge et qui résident officiellement en Belgique (qu’elles soient nées en Belgique ou à l’étranger). Dans les statistiques belges, si une personne a la nationalité belge et une nationalité étrangère (double nationalité), elle sera uniquement comptabilisée comme Belge et non comme étrangère. Le critère retenu ici est la nationalité actuelle.

Nous la définissons ici comme l’ensemble des personnes qui ne sont pas nées belges et qui résident officiellement en Belgique. Elles peuvent être nées en Belgique ou à l’étranger. Certains sont devenus Belges, d’autres non. Le critère est la nationalité à la naissance.

Cahier « Population et mouvements »

Édité chaque année par Myria, le Centre fédéral Migration. C'est l’un des deux organismes ayant hérité des compétences de l’ex-Centre pour l’égalité des chances et la lutte contre le racisme, avec Unia, le Centre interfédéral pour l’égalité des chances.

  1. Catherine Wihtol de Wenden, La mondialisation des migrations, TEDxBelfort. URL : https://www.youtube.com/watch?v=dT8B8Epdwqk []
  2. Myria, Rapport sur les migrations 2016, chapitre 2 Migrations en Belgique : données statistiques, URL : https://www.myria.be/files/Migration2016-2-Migrations_en_Belgique_donnees_statistiques.pdf []